Au courant du ramadan dernier, notre ami Naceur Ayed a pris la louable initiative d’organiser dans son « Rabat » natal la fête du « kourdiène », notre sabayon local. Ces blancs d’œufs battus en neige afin d’accompagner un café turc bien mousseux est une tradition ramadanesque typique de ce quartier très singulier et donc, une des facettes de notre patrimoine immatériel que notre éminent chimiste a bien fait de relancer ne serait-ce que l’espace d’un après-midi. Alors que c’était l’euphorie au Rabat et toute l’assistance se donnait à cœur joie de battre les œufs dans les bols, des badauds, étrangers à la ville et au quartier sans aucun doute, puisque dans un accent idiomatique qui ne pouvait être que d’ailleurs, ils voulaient savoir à quoi rimait tout ce manège! Justement, venons en à l’accent typiquement, nabeulien, composante intégrante de notre patrimoine nabeulien. Ce merveilleux « tich », qui jadis faisait notre fierté, n’en déplaise à ceux qui veulent s’en défaire à jamais! Un signe distinctif dialectal qui a tendance à fondre comme neige au soleil parce que tout notre legs culturel est en train de fondre lentement et sûrement, dans l’ensemble des apports culturels exogènes qui minent, inexorablement, notre creuset nabeulien depuis que la ville a commencé à s’agrandir! C’est la rançon du développement local! Ce phénomène s’explique également par la migration des Nabeuliens vers d’autres cieux pour des raisons professionnelles ou d’études. En plus, nous ne marions plus entre nous autant que c’était, il y a un demi siècle, voire moins. Bien des facteurs du temps présent et propres aux nouvelles mutations sociétales favorisent, donc, l’éclatement de l’autarcie culturelle très couleur locale qui sévissait d’elle-même, tout naturellement, durant des lustres.

Personnellement, j’admire les Sahéliens, les Sfaxiens, les Djéridiens et bien d’autres Tunisiens qui se préservent en tant que groupes idiomatiques et exhibent, fièrement, leurs accents dialectaux à qui veut les écouter!

RACHED kHAYATI