L’Institut Arabe des Chefs d’Entreprises (IACE) a présenté au Parlement un ensemble complet de recommandations visant à structurer la Loi de Finances 2026 autour de trois axes majeurs : relancer l’économie, renforcer la compétitivité et rétablir l’équité fiscale. L’institut estime que la conjoncture actuelle exige une réforme ambitieuse capable de stimuler l’investissement et d’accompagner les entreprises les plus exposées aux crises successives.
Un taux d’imposition préférentiel pour l’industrie
Dans une approche résolument orientée vers la valeur ajoutée, l’IACE propose d’instaurer un taux d’impôt sur les sociétés (IS) de 15 % pour les activités industrielles, contre 25 % pour les activités commerciales et 20 % pour les services.
L’objectif : restaurer la vigueur du secteur manufacturier, considéré comme un pilier stratégique de la reprise économique.
Allègements fiscaux pour les petites structures
L’institut appelle également à réduire la pression fiscale sur les entreprises individuelles, jugée beaucoup plus lourde que celle supportée par les sociétés. Il recommande en outre l’exonération du troisième acompte provisionnel pour les entreprises affichant un excédent d’impôt durant trois années consécutives, afin de libérer davantage de trésorerie.
Modernisation des règles fiscales
L’IACE propose plusieurs mesures structurantes, notamment :
- révision du champ des charges déductibles,
- clarification du régime fiscal des véhicules professionnels,
- allongement du délai de report des pertes de 5 à 10 ans, une mesure essentielle après les crises économiques récentes,
- suppression des obstacles liés à la déduction totale des montants réinvestis dans l’acquisition de terrains, afin de stimuler l’investissement agricole et régional,
- réintroduction du dégrèvement matériel, supprimé en 2017, pour encourager le renouvellement des équipements productifs.
Fiscalité internationale et TVA : un repositionnement stratégique
L’institut recommande de supprimer la double imposition appliquée aux entreprises tunisiennes opérant à l’étranger, une mesure décisive pour l’expansion internationale.
Sur le plan de la TVA, l’IACE préconise :
- la restauration du régime suspensif pour les entreprises exportatrices et de services,
- une réduction de 19 % à 13 % de la TVA sur les logements dépassant 400 000 dinars, afin de soutenir un secteur immobilier en difficulté.
Renforcement des droits du contribuable
Afin d’améliorer la transparence, l’IACE demande que toute imposition d’office inclue une notification préalable obligatoire, y compris en cas de pénalités.
L’institut insiste également sur la nécessité de consolider les garanties juridiques du contribuable, pour restaurer la confiance envers l’administration fiscale.
Impôt sur la fortune : maintenir le système actuel mais l’encadrer
Selon l’IACE, il est crucial de maintenir l’impôt sur la fortune, mais en le limitant strictement aux biens immobiliers non productifs. L’objectif est double :
- éviter la fuite des capitaux,
- préserver l’épargne,
- réduire les risques d’évasion fiscale.
L’institut recommande également d’exempter les non-résidents possédant des biens en Tunisie financés en devises, ainsi que les étrangers résidents détenant des biens hors du pays.
Ce que prévoit le Projet de Loi de Finances 2026 pour les entreprises
En parallèle de ces recommandations, le Projet de Loi de Finances 2026 (PLF 2026) inclut plusieurs mécanismes de financement destinés à soutenir les entreprises, les PME et les porteurs de projets.
Des lignes de crédit ciblées pour dynamiser l’investissement
Parmi les mesures phares :
- 15 millions de dinars (MD) pour soutenir les sociétés implantées dans les régions défavorisées,
- 35 MD destinés à renforcer les lignes de crédit au profit des sociétés communautaires,
- 10 MD pour financer les charges de gestion et d’exploitation des PME, opérationnel du 1er janvier 2026 au 31 décembre 2027,
- 23 MD de prêts sans intérêts ni garanties pour les jeunes promoteurs et petites entreprises,
- 10 MD dédiés aux petits agriculteurs pour financer la saison agricole 2025–2026.
Ces dispositifs traduisent la volonté du gouvernement de soutenir la création d’emploi, d’améliorer l’accès au financement et de réduire les disparités régionales.
L’ensemble des propositions de l’IACE et les orientations du PLF 2026 convergent vers un objectif commun : réinventer la fiscalité tunisienne pour relancer l’économie, améliorer la compétitivité et encourager l’investissement productif. Le défi reste désormais leur adoption et leur mise en œuvre dans un contexte où les entreprises réclament une réforme cohérente et durable.
