Les banques tunisiennes poursuivent leur activité dans un environnement macroéconomique difficile, selon un récent rapport de Fitch Ratings. L’agence américaine souligne que le secteur demeure confronté à une inflation élevée, une croissance économique atone et des taux d’intérêt persistants, autant de facteurs qui freinent l’expansion du crédit et limitent la capacité de financement de l’économie réelle.
Une croissance du crédit quasi stagnante
Sur les cinq premiers mois de 2025, la croissance du crédit n’a progressé que de 0,6 %, reflet d’une demande de financement modérée et d’une forte absorption des ressources par l’État. Cette situation restreint l’accès au crédit pour les autres secteurs économiques, en particulier les entreprises privées. Fitch explique que cette dynamique traduit une préférence accrue du système bancaire pour le financement souverain, jugé moins risqué et plus rentable à court terme.
Amélioration de la note souveraine, mais pas d’effet d’entraînement sur le secteur bancaire
En septembre 2025, Fitch Ratings avait relevé la note souveraine de la Tunisie à “B-” avec perspective stable, saluant une meilleure discipline budgétaire. Toutefois, cette amélioration ne devrait pas, selon l’agence, se traduire par une amélioration significative des conditions d’exploitation des banques. Malgré la révision à la hausse de la note de l’environnement opérationnel, les marges bancaires restent comprimées et la rentabilité demeure sous pression.
Des créances douteuses au plus haut depuis quatre ans
Le taux de créances douteuses (NPL) du secteur bancaire tunisien a atteint 14,7 % à fin mars 2025, contre 13,1 % fin 2021 — son plus haut niveau depuis quatre ans. Une partie importante de ces créances correspond toutefois à des actifs hérités de périodes antérieures, laissant entrevoir un potentiel de réduction du ratio NPL à moyen terme, selon Fitch Ratings. Cette évolution dépendra néanmoins de la capacité du secteur à renforcer ses dispositifs de recouvrement et à améliorer la qualité de ses portefeuilles.
Une rentabilité toujours modeste malgré une hausse des bénéfices
Entre 2022 et le premier trimestre 2025, le rendement moyen des capitaux propres (ROE) s’est établi à 10,6 %, un niveau jugé modeste au regard des risques encourus.
Au premier semestre 2025, le résultat net cumulé des dix principales banques tunisiennes a progressé de 13 % en glissement annuel. Cependant, cette amélioration a été neutralisée par la hausse du coût du risque (+21 %) et par une augmentation des charges d’exploitation (+8 %).
Des conditions de liquidité stables, mais sous vigilance
Fitch Ratings estime que les conditions de liquidité du secteur restent satisfaisantes et devraient le demeurer en 2026.
Les dépôts de la clientèle, principale source de financement des banques, ont progressé de 3 % sur les cinq premiers mois de 2025, contre 10 % sur la même période en 2024. En parallèle, les encours de crédit n’ont augmenté que de 0,6 %.
Le refinancement auprès de la Banque centrale de Tunisie (BCT) représente 5 % du passif sectoriel à fin mai 2025, un niveau maîtrisé.
Vers une exposition accrue à la dette souveraine
Fitch anticipe une augmentation progressive de l’exposition des banques tunisiennes à la dette publique en 2026. Cette tendance serait portée par une faible demande de crédit privé et des rendements ajustés au risque attractifs sur les titres publics.
L’agence avertit toutefois que cette dépendance accrue au financement de l’État pourrait accroître la vulnérabilité du système bancaire en cas de choc budgétaire ou de tension sur la dette souveraine.
