Les enjeux et les opportunités du développement du secteur des assurances en Tunisie

Depuis quelques années, on assiste à une mutation du secteur des assurances dans le monde. Il a connu un accroissent de la concurrence, une transformation des modèles de distribution, une digitalisation accrue de la relation avec les clients, une conformité réglementaire de plus en plus exigée, une multiplication des services associés et une pression à la libéralisation. Face à ces changements, les acteurs du secteur de l’assurance tunisien devront s’adapter à cette nouvelle donne en renouvelant leur business model et en reconsidérant en profondeur leur mode de gouvernance, leur organisation et leur réseau de distribution.

Le secteur tunisien reste dominé par l’assurance des véhicules suite à l’augmentation du parc d’automobile et du nombre d’accident de la route. Les autres activités mobilisatrices d’épargne comme celles liées à l’assurance vie et à la retraite par capitalisation complémentaire sont peu développées par rapport à la moyenne mondiale. Cette faiblesse est due à l’importance du sentiment de solidarité entre les membres des familles en général et au fort comportement altruiste des enfants envers leurs parents. Ces comportements remplacent en fait en partie l’assurance vie et les compléments de retraite puisqu’ils permettent des transferts de fonds d’une part entre les membres d’une même famille et d’autre part entre les jeunes actifs et leurs parents à la retraite.

Ces contraintes structurelles ont entrainé un faible taux de pénétration (rapport entre le chiffre d’affaires global hors transactions internationales et le PIB) dans l’économie qui est estimé à 2% contre un taux moyen mondial proche de 6,5% et une faible densité (chiffre d’affaires par tête d’habitant) évaluée à 150,517 dinars en 2015 contre une moyenne mondiale proche de 1500 dinars. Presque la moitié de cette prime d’assurance est consacrée à l’assurance automobile et environ 16% est réservée à l’assurance vie dont une bonne proportion est liée à l’activité des crédits bancaires aux particuliers.

Ces proportions sont inversées dans les pays développés dont le portefeuille est constitué entre 50 et 70% par l’assurance vie. En outre, la majorité des Tunisiens ne sont pas satisfaits de la qualité des prestations, des délais de règlements et de la tarification des assurances et surtout celles automobiles. En dépit de la faiblesse de ces indicateurs, le secteur dispose d’un
fort potentiel de croissance à exploiter à court et moyen termes. Pour assurer cette croissance, il doit relever quatre principaux challenges:

i) Développer l’assurance vie dans l’objectif de mobiliser l’épargne et améliorer la situation financière des compagnies. La crise actuelle, les déséquilibres des caisses de sécurité sociales, l’évolution démographique, l’incertitude concernant le modèle actuel des retraites par répartition et l’impossibilité de garder le degré élevé de générosité du système actuel des régimes de retraite obligent les actifs à constituer un régime de retraite complémentaire et une assurance vie. Il est important d’inciter ces actifs à assurer une meilleure complémentarité entre le régime de retraite obligatoire par répartition et le régime de retraite complémentaire par capitalisation.

ii) Améliorer l’image des compagnies en réduisant le retard excessif de l’indemnisation et la lourdeur des procédures administratives.

iii) Renforcer le réseau de distribution traditionnel par l’introduction des NTIC et notamment le digital et l’exploitation du canal internet haut débit, le Mobile et les réseaux sociaux (Facebook, réseau professionnel Linkedin etc.). Ce canal permet de simplifier et faciliter la compréhension de l’offre des nouveaux services, de renforcer le lien de confiance avec les clients, d’améliorer la mobilité de la relation client par l’interactivité, la personnalisation et l’instantanéité, d’attirer de nouveaux clients et de fi déliser les anciens.

iv) Développer la bancassurance pour consolider le partenariat gagnant-gagnant entre les banques et les compagnies d’assurance et partager ainsi les risques. Aujourd’hui dans plusieurs pays développés, les compagnies d’assurances offrent des services bancaires comme la tenue de compte et l’octroi des crédits, ce qui donne une opportunité d’exploiter un réseau beaucoup plus important. De l’autre côté, les banques proposent des produits d’assurance comme ceux de l’IARD (Incendie, Accidents, Risques Divers), de transport, vie, décès et autres. Ce mécanisme permet aux banques de générer un revenu additionnel, diversifier leurs activités et renforcer la satisfaction et la fi délisation de leurs clients. Du côté des clients, ils auront une accessibilité plus grande à la fois aux produits bancaires et aux produits d’assurance à des prix plus intéressants que dans le système traditionnel.

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D’après MACSA
Pr Ghazi Boulila