Le ministère des Finances a récemment publié le projet de Loi de Finances 2026 (PLF 2026), dévoilant des prévisions budgétaires qui soulignent les défis financiers auxquels la Tunisie devra faire face. Selon ce document officiel, les charges budgétaires totales sont estimées à 63,575 milliards de dinars, un montant considérable qui contraste fortement avec les ressources budgétaires prévues.
Les ressources budgétaires, quant à elles, ne dépasseront pas 52,560 milliards de dinars pour l’exercice 2026. Cette différence substantielle entre les dépenses et les recettes met en lumière les tensions structurelles qui pèsent sur les finances publiques tunisiennes. L’essentiel de ces ressources proviendra des recettes fiscales, évaluées à 47,773 milliards de dinars, représentant ainsi 82% de l’ensemble des ressources budgétaires de l’État. Cette forte dépendance aux recettes fiscales démontre l’importance cruciale de l’efficacité du système fiscal et de la collecte de l’impôt pour l’équilibre des comptes publics.
Un déficit budgétaire de 11,015 milliards de dinars à combler
L’écart entre les charges et les ressources se traduit par un déficit budgétaire prévu de 11,015 milliards de dinars pour l’année 2026. Ce déséquilibre significatif représente environ 17,3% des charges totales et nécessitera des solutions de financement appropriées pour assurer le fonctionnement régulier de l’appareil étatique et le respect des engagements du gouvernement.
Ce déficit budgétaire s’inscrit dans un contexte économique marqué par des contraintes multiples, notamment la pression sur les finances publiques, les besoins croissants en investissements infrastructurels et les obligations sociales de l’État. La gestion de ce déficit constituera un enjeu majeur pour les autorités financières tunisiennes tout au long de l’exercice 2026.
Des ressources de trésorerie de 27 milliards de dinars pour équilibrer les comptes
Pour faire face à ses obligations financières, l’État tunisien prévoit de mobiliser des ressources de trésorerie s’élevant à 27 milliards de dinars au cours de l’exercice 2026. Ces ressources joueront un rôle déterminant dans le maintien de la stabilité financière du pays et la couverture de ses engagements multiples.
Selon le PLF 2026, ces ressources de trésorerie seront principalement affectées à trois postes majeurs. En premier lieu, elles serviront à financer le déficit du budget de l’État, à hauteur de 11 milliards de dinars. Ensuite, une part substantielle sera consacrée au remboursement des services de la dette intérieure, estimés à 7,932 milliards de dinars. Enfin, le remboursement des services de la dette extérieure nécessitera 7,917 milliards de dinars. Cette répartition illustre le poids considérable du service de la dette dans les finances publiques tunisiennes, avec près de 15,849 milliards de dinars dédiés uniquement au remboursement de la dette, soit plus de 58% des ressources de trésorerie mobilisées.
Un recours massif aux emprunts intérieurs et extérieurs
Le financement des besoins de trésorerie reposera essentiellement sur une stratégie d’endettement combinant sources intérieures et extérieures. Les emprunts intérieurs constitueront la principale source de financement avec 19 milliards de dinars, soit environ 70% des ressources de trésorerie totales. Cette prédominance de l’endettement intérieur témoigne de la volonté des autorités de privilégier le marché financier domestique et de limiter l’exposition aux risques de change.
Parallèlement, les emprunts extérieurs apporteront 6,8 milliards de dinars supplémentaires aux caisses de l’État. Au total, le montant cumulé des emprunts intérieurs et extérieurs atteindra 25,8 milliards de dinars, un niveau d’endettement significatif qui soulève des interrogations sur la soutenabilité de la dette publique à moyen et long terme.
Cette stratégie de financement par l’endettement, bien que nécessaire dans le contexte actuel, accroîtra mécaniquement le stock de la dette publique et alourdira les charges futures liées au service de cette dette. Les autorités devront donc veiller à maintenir un équilibre délicat entre les besoins de financement immédiats et la préservation de la viabilité financière à long terme.
La BCT autorisée à accorder 11 milliards de dinars de facilités
Une disposition particulièrement notable du PLF 2026 figure à l’article 12, qui prévoit d’autoriser la Banque Centrale de Tunisie (BCT) à accorder des facilités de financement au profit de la trésorerie générale de la Tunisie, à hauteur de 11 milliards de dinars. Cette mesure exceptionnelle illustre l’ampleur des besoins de financement de l’État et le recours à des mécanismes de financement direct par la banque centrale.
Ces facilités bénéficieront de conditions particulièrement avantageuses pour le Trésor public. Elles devront être remboursées sans intérêts, ce qui représente un avantage financier considérable par rapport aux emprunts classiques. Le remboursement s’étalera sur une période de 15 ans, assortie d’une période de grâce de 3 ans pendant laquelle aucun remboursement ne sera exigé.
Cette intervention de la BCT, bien que nécessaire dans les circonstances actuelles, soulève des questions sur l’indépendance de la banque centrale et le respect des bonnes pratiques en matière de financement monétaire des déficits publics. Elle témoigne néanmoins de la volonté des autorités de sécuriser les financements nécessaires au fonctionnement de l’État.
Un budget de 1,585 milliard de dinars pour le secteur public
Le PLF 2026 prévoit également un budget spécifique destiné à appuyer financièrement le secteur public tunisien. Ce budget, estimé à 1,585 milliard de dinars, est conçu pour soutenir les ministères et les entreprises publiques dans l’accomplissement de leurs missions.
Il convient de noter que le secteur public tunisien emploie un effectif considérable de 687 mille agents, ce qui représente une masse salariale importante et un poids significatif dans les finances publiques. Ce budget d’appui vise à assurer le bon fonctionnement des administrations et des entreprises publiques, tout en contribuant à la modernisation et à l’amélioration de l’efficacité du secteur public.
Cette enveloppe budgétaire témoigne de l’engagement de l’État envers ses structures publiques, malgré les contraintes financières, et souligne l’importance stratégique du secteur public dans l’économie tunisienne et la fourniture des services essentiels aux citoyens
