Une mobilisation continue pour une information fiable et accessible
La persistance des idées fausses sur le tabac malgré des campagnes de sensibilisation régulières souligne un manque d’informations fiables et d’accompagnement adapté. C’est dans ce contexte que Med.tn s’engage depuis quatre ans, comme le rappelle Emna Jellouli, cofondatrice de la plateforme. « Nous organisons cet événement pour répondre à une forte demande d’information sur les alternatives au tabac, telles que les patchs, les gommes ou la cigarette électronique », explique-t-elle.
Le thème « Le vrai du faux » a été choisi en réponse directe aux questions fréquentes des utilisateurs de Med.tn. Les débats, menés par un addictologue et un cardiologue, ont abordé des sujets clés : l’efficacité des substituts, la dangerosité des cigarettes électroniques, ou encore les raisons des échecs de sevrage. Tous les échanges sont désormais disponibles en ligne sur Med.tn, garantissant un accès permanent à cette information vitale. Emna Jellouli souligne l’importance de cette initiative : « La lutte contre le tabac est un enjeu de santé publique, et elle ne peut pas reposer uniquement sur l’État. »
Les chiffres alarmants du tabagisme en Tunisie
Le Dr Dhaker Lahidheb, cardiologue et ancien professeur à la Faculté de Médecine de Tunis, a présenté des chiffres préoccupants lors de la table ronde. En Tunisie, entre 30 et 35 % des adultes fument, un taux significativement plus élevé que dans de nombreux pays voisins. Cette prévalence élevée, bien que partiellement liée à la densité des études épidémiologiques locales, reflète une réalité alarmante.
La consommation de tabac chez les femmes tunisiennes, bien que minoritaire, est en hausse, atteignant près de 1,8 %. Plus inquiétant encore, la consommation de tabac chez les jeunes explose. La Tunisie se classe au 26e rang mondial en termes de consommation moyenne de cigarettes par personne, un indicateur frappant de l’ampleur du problème. Le tabac est un facteur de risque majeur pour de nombreuses pathologies graves, notamment les maladies cardiovasculaires, les cancers et les troubles respiratoires. Malheureusement, les solutions de sevrage, comme les patchs, les substituts nicotiniques, la psychothérapie ou l’acupuncture, restent peu accessibles et rarement prises en charge en Tunisie.
Prudence et soutien psychologique : les clés du sevrage
Le Dr Lahidheb a insisté sur l’importance d’un accompagnement bienveillant des personnes dépendantes, plutôt qu’un discours culpabilisant. Selon lui, les solutions existent — traitements de substitution, patchs, psychothérapie, acupuncture — mais sont encore trop peu accessibles en Tunisie.
Il met également en garde contre les dérives liées aux produits de substitution mal encadrés, comme certains liquides de vapotage aux arômes attractifs, qui peuvent être des vecteurs de nouveaux risques, notamment chez les jeunes. Il admet toutefois que certains outils comme le tabac chauffé peuvent constituer des alternatives moins nocives lorsqu’ils sont utilisés dans un cadre strictement encadré.
Pour le Dr Anas Laouini, sexologue et spécialiste en thérapies comportementales, l’arrêt du tabac ne se résume pas à une question de volonté. Il s’agit avant tout d’une addiction psychologique qui nécessite un accompagnement personnalisé. Cet accompagnement vise à aider le fumeur à comprendre ses automatismes et à réapprendre à vivre sans cigarette. Le Dr Laouini a salué l’approche collaborative de Med.tn, soulignant qu’une démarche continue et impliquant les éducateurs, les familles et les autorités est essentielle pour faire reculer durablement le tabagisme, en particulier chez les jeunes. Il a également attiré l’attention sur les effets méconnus du tabac, notamment les troubles sexuels, qui impactent la santé mentale et les relations personnelles des fumeurs.
Faire du sevrage une priorité nationale
La table ronde organisée par Med.tn a clairement démontré que le sevrage tabagique est non seulement possible, mais qu’il nécessite une prise en charge globale. L’information, les outils d’aide, le soutien psychologique et l’accessibilité aux traitements doivent être les piliers d’une politique de santé publique ambitieuse en Tunisie.
L’appel des médecins est retentissant : la Tunisie ne peut plus ignorer les ravages du tabac. Il est impératif de renforcer les dispositifs d’aide, d’élargir l’accès à des alternatives sûres et d’instaurer une mobilisation nationale forte pour accompagner chaque fumeur dans son parcours vers une vie sans tabac.