La BH Bank se trouve actuellement confrontée à un risque de crédit substantiel, découlant d’engagements financiers importants envers un groupe d’affaires prédominant dans le secteur oléicole tunisien. Les données financières, auditées par les commissaires aux comptes et publiées par le Conseil du marché financier (CMF), révèlent qu’au 31 décembre 2024, l’encours total des crédits accordés à cette seule contrepartie s’élève à un montant considérable de 450,8 millions de dinars (MD). Cette concentration significative d’engagements soulève des préoccupations quant à la gestion des risques au sein de l’institution bancaire et à sa potentielle vulnérabilité face aux aléas économiques et financiers touchant ce secteur spécifique.
Bien qu’à la clôture de l’exercice 2024, cette créance ait été initialement classée parmi les actifs sains, exempts d’impayés, une évolution défavorable et postérieure de la situation financière du groupe oléicole vient sérieusement remettre en question cette classification. Le rapport des commissaires aux comptes met en évidence des signaux concrets de détérioration, affectant à la fois la santé financière de l’entreprise et la qualité des garanties associées aux prêts. Des difficultés croissantes dans le recouvrement de ses propres créances commerciales par le groupe oléicole constituent un indicateur alarmant, augmentant significativement le risque de non-recouvrement pour la BH Bank.
Face à cette dégradation avérée, les normes prudentielles édictées par la Banque centrale de Tunisie (BCT) exigeraient un reclassement impératif de cette exposition parmi les créances dites « incertaines » ou « douteuses ». Cette situation met en lumière des interrogations légitimes concernant l’efficacité de la gouvernance du risque de crédit au sein de la BH Bank et le respect scrupuleux des seuils réglementaires internes à l’établissement financier. L’ampleur de l’exposition, concentrée sur un seul acteur économique, déroge aux principes fondamentaux de diversification des risques bancaires, habituellement préconisés pour assurer la robustesse et la stabilité du bilan d’une banque.
L’enjeu financier prend une dimension encore plus critique lorsque l’on compare le montant du crédit octroyé au capital social de la BH Bank et à son produit net bancaire (PNB). L’encours de 450,8 MD représente près du double du capital social de la banque, qui s’établissait à 238 MD à fin 2024. De plus, cette exposition équivaut à environ 60% du PNB de la BH Bank sur la même période, lequel s’élevait à 744,2 MD. Cette concentration excessive sur un unique client constitue une anomalie significative par rapport aux pratiques bancaires prudentielles, qui insistent sur la nécessité de distribuer les risques à travers un portefeuille d’engagements diversifié.
Les textes réglementaires tunisiens sont clairs en matière de limitation des risques de concentration. La circulaire n° 91-24 de la BCT, datée du 17 décembre 1991 et toujours en vigueur malgré des amendements ultérieurs, stipule un plafond de concentration interdisant l’octroi de crédits à un même client au-delà de 20% des fonds propres nets de la banque. Dans le cas présent, l’exposition de la BH Bank envers le groupe oléicole semble largement dépasser ce seuil réglementaire, exposant potentiellement l’institution à des sanctions de la part des autorités de régulation ou à une injonction de prendre des mesures correctives urgentes.
Malgré ce contexte de risque de crédit significatif, la BH Bank a affiché en 2024 un résultat net positif de 108,5 MD, avec des produits d’exploitation bancaire atteignant 1 489,1 MD. Cependant, il est crucial de noter que les dotations aux provisions sur créances ont connu une augmentation substantielle, s’élevant à 275,2 MD. Cette augmentation signale une pression croissante sur la rentabilité de la banque, directement liée à la détérioration de la qualité de son portefeuille de crédits et à la nécessité d’anticiper d’éventuelles pertes futures.
En conclusion, cette situation met en évidence l’impérative nécessité pour l’ensemble du secteur bancaire tunisien de renforcer en continu ses dispositifs de contrôle des risques, en particulier dans les secteurs économiques sensibles tels que l’agroalimentaire, souvent soumis à des fluctuations importantes. Elle soulève également des questions fondamentales concernant la surveillance effective des engagements financiers significatifs et l’application rigoureuse des règles prudentielles établies par la Banque centrale de Tunisie, afin de préserver la stabilité et la pérennité de l’ensemble du système financier national.